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Publié le 10 Mai 2017

d’Holbach (fils de viticulteur, baron, encyclopédiste, matérialiste, anticlérical, athée, chimiste de formation, il tient un des plus grands salon de son époque, fréquente la très respectable loge des 9 sœurs)

En italique le texte du baron d'Holbach, et en texte normal des remarques

"Système de la nature"

1770 (Tome 2, pp. 321-338). Chapitre XI "Apologie des sentiments contenus dans cet ouvrage. De l’impiété. Existe-t-il des athées ?"

 

L’homme n’est libre dans aucun des instants de sa durée.

Il y va fort le baron, mais au moins ça thèse est claire.

 

Il n’est pas maître de sa conformation qu’il tient de la nature ;

En effet, nous ne sommes pour rien si nous sommes aveugles, sourds, hétérosexuel, blonds etc.

 

il n’est pas maître de ses idées ou des modifications de son cerveau qui sont dues à des causes qui malgré lui et à son insu agissent continuellement sur lui ;

D'Holbach n'utilise ni les termes d’inconscient ou de psychanalyse freudienne, ni ceux de d'habitus ou de reproductions sociales chères à Bourdieu mais pourtant tout est déjà dit.

 

il n’est point maître de ne pas aimer ou désirer ce qu’il trouve aimable et désirable ;

En effet, si je suis un estomac sur pattes qui mangent tout ce n'est pas par choix, mais à cause de mon histoire personnelle. Si j'aime Queen et pas Depeche Mode, l'Histoire et pas les langues cela vient des circonstances de mes sociabilisations.

 

il n’est pas maître de ne pas choisir ce qu’il croit le plus avantageux ;

Nous sommes, homo economicus que nous-sommes, sensés choisir ce que nous croyons être le plus avantageux (la période électorale que nous vivons en est un bon exemple). Mais le terme important dans cette phrase est pour moi croire

 

il n’est pas maître d’agir autrement qu’il ne fait au moment où sa volonté est déterminée par son choix.

 

La thèse de d'Holbach est dans nette et claire : l'homme n'est pas libre ; ce qu'il est et ce qu'il fait n'est que la suite de situations et d'actions précédentes.

Deux objections maçonniques pourraient germer dans nos esprits. D'Holbach était libre et de bonnes mœurs, non ? En fait il est né libre, donc dans un état non servile ce qui lui permet d'être initié. La devise républicaine Liberté, Égalité, Fraternité semble indissociable de la FM, mais elle n'est adoptée qu'en 1848 par la Franc-Maçonnerie.

 

Dans quel moment l’homme est-il donc le maître ou libre dans ses actions ?


Ce que l’homme va faire est toujours une suite de ce qu’il a été, de ce qu’il est, de ce qu’il a fait jusqu’au moment de l’action. Notre être actuel et total, considéré dans toutes ses circonstances possibles, renferme la somme de tous les motifs de l’action que nous allons faire ; principe à la vérité duquel aucun être pensant ne peut se refuser.

En gros, si j'agis de telle manière aujourd'hui plutôt que d'une telle autre autre c'est parce qu'il y a un ensemble de circonstances qui m'y poussent de manière consciente ou pas. En vrac et en essayant de montrer une palette large de circonstances : j'ai trouvé il y a 2 ans un bouquin de Onfray avec ce texte de d'Holbach, j'ai pas été chez moi ce week-end, notre VM Florian m'a prévenu il y a une semaine que je planchais aujourd'hui, d'Holbach m'a fait penser à notre Frère Secrétaire et à son goût pour Bach, je voulais lire simplement le texte mais j'ai pensé que j'allais avoir sur la conscience les ronflements de certains Frères, la phrase libre et de bonnes mœurs m'a autant surpris lors de mon initiation que le fait de prêter serment sur la Bible etc

 

Notre vie est une suite d’instants nécessaires, et notre conduite bonne ou mauvaise, vertueuse ou vicieuse, utile ou nuisible à nous-mêmes ou aux autres, est un enchaînement d’actions aussi nécessaires que tous les instants de notre durée. vivre c’est exister d’une façon nécessaire pendant des points de la durée qui se succèdent nécessairement ; vouloir, c’est acquiescer ou ne point acquiescer à demeurer ce que nous sommes ; être libre c’est céder à des motifs nécessaires que nous portons en nous-mêmes.

vouloir, c’est acquiescer ou ne point acquiescer à demeurer ce que nous sommes ;

être libre c’est céder à des motifs nécessaires que nous portons en nous-mêmes.

Voilà 2 phrases MTCF qui me semblent bien complexes à saisir et j'aurai besoin de votre aide pour y parvenir.

Vouloir, serait donc appliquer sa volonté à l'acceptation ou refus (et donc peut être à la tentative de changer) de ce que nous sommes. Par exemple il m'a fallu des années de luttes contre ce qui était presque un instinct de cracher à la gueule d'un rentier ou d'un capitaliste car j'étais un prolo.

Être libre, serait donc de se servir de sa volonté pour choisir entre les potentialités présentes en soi et provoqués par les circonstances qui nous ont amené à cet instant là.


Si nous connaissions le jeu de nos organes ; si nous pouvions nous rappeler toutes les impulsions ou modifications qu’ils ont reçues, et les effets qu’elles ont produits, nous verrions que toutes nos actions sont soumises à la fatalité, qui règle notre système particulier comme le système entier de l’univers ; nul effet en nous, comme dans la nature, ne se produit au hasard, qui, comme on l’a prouvé, est un mot vide de sens. Tout ce qui se passe en nous ou ce qui se fait par nous, ainsi que tout ce qui arrive dans la nature, ou que nous lui attribuons, est dû à des causes nécessaires, qui agissent d’après des lois nécessaires, et qui produisent des effets nécessaires, d’où il en découle d’autres.


La fatalité est l’ordre éternel, immuable, nécessaire, établi dans la nature, ou la liaison indispensable des causes qui agissent avec les effets qu’elles opèrent. D’après cet ordre les corps pesants tombent, les corps légers s’élèvent, les matières analogues s’attirent, les contraires se repoussent ; les hommes se mettent en société, se modifient les uns les autres, deviennent bons ou méchants, se rendent mutuellement heureux ou malheureux, s’aiment ou se haïssent nécessairement d’après la manière dont ils agissent les uns sur les autres.

 

D’où l’on voit que la nécessité qui règle les mouvements du monde physique règle aussi tous ceux du monde moral, où tout est par conséquent soumis à la fatalité. En parcourant à notre insu et souvent malgré nous la route que la nature nous a tracée, nous ressemblons à des nageurs forcés de suivre le courant qui les emporte ; nous croyons être libres parce que tantôt nous consentons, tantôt nous ne consentons point à suivre le fil de l’eau qui toujours nous entraîne ; nous nous croyons les maîtres de notre sort, parce que nous sommes forcés de remuer les bras dans la crainte d’enfoncer.


volentem ducunt fata, nolentem trahunt. Seneca Les destins conduisent celui qui se soumet à leurs arrêts ; ils entraînent celui qui résiste.


Les idées fausses que l’on s’est faites sur la liberté sont en général fondées sur ce qu’il y a des événements que nous jugeons nécessaires, parce que nous voyons qu’ils sont des effets constamment et invariablement liés à de certaines causes, sans que rien puisse les empêcher, ou parce que nous croyons entrevoir la chaîne des causes et des effets qui amènent ces événements, tandis que nous regardons comme contingents les événements dont nous ignorons les causes, l’enchaînement et la façon d’agir : mais dans une nature où tout est lié, il n’existe point d’effet sans cause ; et dans le monde physique ainsi que dans le monde moral, tout ce qui arrive est une suite nécessaire de causes visibles ou cachées, qui sont forcées d’agir d’après leurs propres essences. Dans l’homme la liberté n’est que la nécessité renfermée au-dedans de lui-même.

 

Pour conclure MTCF, j'ai la sensation que c’est qu’un des enjeux de la FM mais aussi des sciences humaines, et peut être même un de leur but, de faire de la connaissance de ce qui nous détermine un moyen de nous libérer de ce qui nous entrave. La connaissance historique, sociologique, psychologique vise toujours, au-delà de la compréhension de ce qui nous détermine, à nous fournir les moyens d’une libération. La connaissance des causes de nos conduites, lorsqu’elles nous sont préjudiciables surtout, doit nous permettre de les supprimer ou d’en limiter les effets.

 

J'ai dit.

Rédigé par FR2

Publié dans #question à l'étude

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